Une équipe d'astrophysiciens, dont fait partie Gilles Fontaine, du
Département de physique de l'Université de Montréal, rapporte dans la
revue Nature la découverte d'étoiles naines blanches à l'atmosphère de
carbone pur!
Les étoiles qui brillent dans le ciel ne sont, en fait, que des réacteurs
thermonucléaires à l'échelle astronomique. Dans leur cour, à des
températures et des pressions qui dépassent de loin ce qui peut être
réalisé sur terre, les réactions de fusion consument l'hydrogène et
l'hélium, les deux éléments les plus légers et les plus abondants dans
l'Univers. L'énergie ainsi libérée s'échappe sous forme de lumière, ce qui
explique l'incroyable luminosité de ces corps stellaires. Lorsque le
carburant nucléaire est épuisé, la très vaste majorité des étoiles
(environ 97 %) terminent leur vie nucléaire en s'effondrant sous la forme
d'astres compacts appelés naines blanches ; c'est le destin de notre
Soleil, par exemple. Les naines blanches, en quelque sorte des «déchets
nucléaires» stellaires, sont donc composées de produits de la
transmutation de l'hydrogène et de l'hélium, essentiellement du carbone et
de l'oxygène. En effet, on estime que quelque 99% de la masse d'une naine
blanche typique est faite de ces deux éléments. Ce «noyau», toutefois,
reste enrobé d'une mince couche d'hélium résiduel, elle-même entourée,
dans 80% des cas, d'une couche encore plus mince d'hydrogène formant une
sorte de structure en oignon. Bien que ne représentant qu'une infime
proportion de la masse totale des naines blanches, de l'ordre de une
partie par 1014, ces couches sont extrêmement opaques et ne permettent pas
de «voir» directement les cendres nucléaires faites du noyau de
carbone-oxygène et de vérifier l'hypothèse de la composition des naines
blanches. Les atmosphères de naines blanches répertoriées jusqu'à présent
montrent donc invariablement une composition dominée soit par de
l'hydrogène, soit par de l'hélium.
Ce fut alors une surprise pour la communauté scientifique quand Patrick
Dufour ― un ancien étudiant du Département de physique l'Université
de Montréal, Gilles Fontaine ― professeur également au Département
de physique de l'Université de Montréal et membre du Centre de recherche
en astrophysique du Québec, et leurs collaborateurs ont récemment fait la
découverte d'une sous-famille de naines blanches montrant des atmosphères
constituées de carbone essentiellement pur. Pour la première fois, on
vérifiait de visu la composition de ces étoiles. Les naines blanches à
atmosphère de carbone sont rares, il est certain, mais les chercheurs en
ont trouvé un grand total de huit dans un répertoire contenant maintenant
près de 10 000 naines blanches! Grâce au projet Sloan Digital Sky Survey
(un projet de cartographie de l'hémisphère nord subventionné par la
Fondation Sloan des États-Unis), le nombre de naines blanches cataloguées
a quadruplé au cours des cinq dernières années, ce qui a conduit, entre
autres, à cette découverte importante dans le domaine.
Car la trouvaille suscite des questions fascinantes pour l'astrophysique
stellaire. Comment forme-t-on de telles étoiles dépourvues d'hydrogène et
d'hélium? Pourquoi semblent-elles concentrées dans un intervalle très
étroit de température superficielle (de 18 000 à 23 000 K) alors que
l'ensemble des naines blanches couvre tout l'intervalle de températures
stellaires connues (de 2 500 à 200 000 K)? Où est passé l'oxygène dans ces
atmosphères dominées par le carbone? Ces étoiles vibrent-elles et, si oui,
pouvons-nous utiliser les outils de l'astéroséismologie pour mieux
comprendre leur structure interne? Quel est l'impact de cette découverte
sur notre compréhension de la théorie de l'évolution stellaire? Même si,
pour l'instant, la découverte de ces astrophysiciens soulève plus de
questions qu'elle n'amène de réponses, elle a été nommée la contribution
la plus importante lors d'une conférence internationale d'astrophysique
stellaire qui a eu lieu à l'Université de Tuebingen (Allemagne) en
septembre dernier, en plus d'être publiée dans le prestigieux journal
Nature.
Patrick Dufour a obtenu en 2007 son doctorat en astrophysique stellaire
théorique au Département de physique de l'Université de Montréal sous la
direction du professeur Pierre Bergeron, également membre du CRAQ. Il a
écrit une thèse remarquable qui l'a particulièrement bien préparé pour sa
découverte d'étoiles au carbone. Il est présentement boursier postdoctoral
du CRSNG à l'Université de l'Arizona (Tucson).
Pour de plus amples renseignements :
Gilles Fontaine
Téléphone : 514-343-6680
Courrier électronique : fontaine@astro.umontreal.ca
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